Blanche : Bûcher dur pour survivre à la crise des années 30

22 février 2019

Photographie des personnages de Blanche et de Clovis qui s'enlacent / Crédit : Attraction images

En 1917, lorsqu’Ovila Pronovost part pour défricher des terres à Barraute, en Abitibi, il participe à la première vague de colonisation de ce vaste territoire encore difficile d’accès et largement dépourvu d’infrastructures. Il n’est pas étonnant qu’Émilie ait refusé de s’exiler dans cette région réputée austère et inhabitable.

Le véritable mouvement de colonisation de la région s’amorce au cours des années 30 sous l’impulsion des plans gouvernementaux qui encouragent les chômeurs à s’installer en région éloignée moyennant une aide financière. En fait, le gouvernement n’a pas le choix d’intervenir, puisque le taux de chômage national frise les 27 % en 1933, les secours directs sont nettement insuffisants, et de nombreuses grèves et agitations menacent l’ordre public. Il devient nécessaire d’occuper les chômeurs et de contrôler le nombre d’indigents affluant vers les villes en prônant un retour à la terre.

Des chômeurs dorment sur des bancs de parc à Montréal, vers 1935 / Crédit : Frank Randall Clarke, un don de Mme Dorothy Clarke

Étroitement encadré par l’Église, le mouvement s’accompagne d’un discours religieux et nationaliste bien illustré dans cet extrait de La Gazette du Nord du 21 avril 1933 :

« La colonisation, ce fut notre passé, ce fut notre présent, ce fut notre survivance; ce fut notre vie pendant trois siècles. C’est le présent qui éloigne de nous le danger du communisme et qui résout le plus simplement nos problèmes sociaux; c’est l’avenir qui sauvera les traditions de la race et lui conservera ses vertus et sa fécondité. »

La véritable Blanche tire de l'eau du puits derrière son dispensaire / Crédit : Gracieuseté de Nathalie Jean, La vraie histoire d'Émilie Bordeleau

C’est dans ce contexte que Blanche se rend dans la toute nouvelle colonie de Grandbois, porte d’entrée sud-ouest du territoire de la Baie-James, pour devenir la première infirmière de la région sous la surveillance stricte du curé Fredette et de l’agent des terres crapuleux M. Duhaime.

Les vaillants colons-bûcherons

Dans les faits, l’Abitibi-Témiscamingue attire la majorité des nouveaux colons de cette période, dont un grand nombre de chômeurs urbains souvent mal préparés aux défis qui les attendent. Environ 25 % des colons doivent abandonner leurs lots, comme la famille Ladouceur dans la série.

C’est que malgré un lourd labeur de défrichage, rares sont les colons qui parviennent à vivre uniquement de leurs terres avant plusieurs années. La majorité d’entre eux doivent combiner les travaux agricoles au travail forestier.

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L’industrie du bois occupant une place importante dans notre histoire, on estime qu’au 19e siècle, plus de la moitié des hommes canadiens travaillent comme bûcheron à un moment de leur vie, à l’exemple d’Ovila et de son père, Dosithée Pronovost, qui montent au chantier en hiver.

Cabane de bûcherons canadiens à la rivière Saint-Maurice, Québec, vers 1860 / Crédit : William Notman, un don de M. James Geoffroy Notman, Musée McCord

Loin de s’essouffler, l’industrie du bois d’œuvre et des pâtes et papiers se développera au 20e siècle et fournira du travail à un grand nombre de Québécois dans plusieurs régions du Québec, dont l’Abitibi.

La vie de bûcheron n’est pas de tout repos! Travaillant généralement six longues journées par semaine, ils s’entassent le soir venu dans des camps rudimentaires et malodorants où règne une discipline quasi spartiate.

Équipe de bûcherons avec des chevaux au début de l'hiver, vers 1925 / Crédit : M. Dufour, don de M. Robert D'Ambroise

L’alcool est interdit, et le silence est parfois exigé à table. Heureusement, la nourriture, très calorique, y est généralement appréciée par les hommes, qui brûlent un nombre impressionnant de calories. Il s’agit aussi d’un des métiers les plus dangereux à l’époque : les blessures sont fréquentes et certains, particulièrement les draveurs, y laissent parfois même leur peau. Dans ces conditions, on imagine aisément que plusieurs, comme Ovila, se livrent à quelques excès lors de leur retour dans le vrai monde.

Des bûcherons sont assis en rond dans leur baraque et appréciant la musique du violoneux Roméo Clément de Farley, au Québec, mars 1943 / Crédit : Bibliothèque et Archives Canada

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